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Le pilotage pour relier et réussir

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Site: Pilotage de l'établissement
Contenu: Pilotage de l'établissement
Livre: Le pilotage pour relier et réussir
Imprimé par: Visiteur anonyme
Date: samedi 23 novembre 2024, 13:51


                                                

 

1.1  Rechercher l’efficacité de l’établissement

Mener et parfois ramener à bon port


Les pratiques de gestion de l’établissement et son efficacité.

Il est reconnu que l’autonomie et la capacité d’adaptation avec laquelle l’établissement s’organise sont des facteurs de première importance dans l’accroissement de la performance de l’enseignement, performance tant recherchée actuellement. La décentralisation dans les systèmes d’éducation, où un rapprochement entre l’action et la décision est recherché au niveau de l’établissement, s’inscrit dans cette reconnaissance. Au-delà d’une autonomie administrative, c’est le développement de la capacité organisationnelle d’adaptation à la réalité et aux besoins des élèves qui peut être source de performance.   Dans l’établissement où s’opère l’enseignement-apprentissage, les pratiques de direction apparaissent comme une des clés de la réussite des élèves, et ce, même si cet apport est reconnu comme étant indirect. Ces pratiques se rapportent non seulement à la gestion des opérations, mais aussi au pilotage de l’établissement dans son ensemble.

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L’influence des pratiques de direction sur la réussite des élèves varie selon leur nature. Selon plusieurs recherches, lorsque les pratiques de direction mettent l’accent sur la mission de l’école et sur des objectifs formulés en termes d’apprentissage des élèves, leur influence sur la réussite de ces derniers, tout en demeurant indirecte, est plus marquée (Wilziers, Bosker et Kruger, 2003. Hallinger et Keck, 1998). La direction d’école exerce cette influence indirecte de deux façons :
  • en créant les conditions nécessaires, propices et favorables à l’enseignement-apprentissage dans lesquelles les intervenantes et intervenants éducatifs exercent leur fonction au regard des apprentissages des élèves visés et des apprentissages obtenus,
  • en assurant le développement professionnel continu des intervenantes et intervenants éducatifs au regard de l’amélioration de leur pratique.

Dans ce pilotage, la création de conditions optimales pour les pratiques d’enseignement-apprentissage et l’organisation scolaire sont liées, car l’organisation scolaire dans son ensemble, de l’aménagement des horaires à la configuration des groupes, est porteuse de leviers permettant la création de conditions gagnantes pour les pratiques d’enseignement-apprentissage.

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Nous concevons que la pratique de gestion d’une direction d’école porte sur quatre domaines de gestion des opérations (représentés dans la figure ci-dessous) par lesquels les intrants de l’établissement sont transformés.

Les domaines de gestion des opérations d’un établissement d’enseignement

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Aux pratiques de gestion des opérations d’un établissement s’ajoutent, pour leur direction, des pratiques de pilotage de ces opérations dans ce que nous convenons d’appeler le système de pilotage (Le Moigne, 1984). Ainsi, est traduite l’idée que dans une pratique de direction d’un établissement, au-delà de la gestion de ses opérations prennent place des interventions de pilotage afin que ces opérations se lient les unes aux autres de façon optimale. À ce titre, nous représentons le pilotage par la figure suivante.

Le pilotage des opérations de l’établissement

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Pilotage est affaire de régulation des actions

Le terme « pilotage » fait référence métaphoriquement à l’action de diriger un navire ou un avion afin de mener les passagers et l’équipage à destination, et ce, selon une performance attendue en termes, bien sûr, de l’atteinte de la destination, mais aussi de la durée du voyage et de l’utilisation des ressources imparties. Si le pilotage est question de destination et de performance, il est surtout question de régulation où le pilote ramène continuellement le bateau ou l’avion sur une trajectoire appropriée en fonction des aléas rencontrés et de la qualité des opérations réalisées qu’il cherche à optimiser. Nous complétons notre représentation du pilotage d’un établissement d’enseignement en y illustrant sa destination soit les résultats d’apprentissage et d’éducation des élèves.

Le pilotage de l’établissement en fonction de ses résultats

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La régulation

Dans le sens où le terme « régulation » a été employé jusqu’ici et où il le sera dans le reste de cet ouvrage, il s’entend au sein de systèmes humains engagés dans des projets d’actions collectives, accompagnés de mécanismes ad hoc. Il est étroitement lié à la gouvernance pratiquée. La régulation est une partie intégrante essentielle et caractéristique des systèmes et de leurs entités. En cybernétique, la régulation vise à établir des équilibres, à procéder à des réajustements par rapport à des normes ou à des objectifs sur la base des informations obtenues par des mesures, par le biais de capteurs et d’indicateurs. (Bouvier, 2007, p. 186)

Une succession d’opérations visant à fixer un but et à orienter l’action vers celui-ci, contrôler la progression de l’action vers le but, assurer un retour sur l’action (un feed-back, une rétroaction), confirmer ou réorienter la trajectoire de l’action, et/ou redéfinir le but ». (Allal, 2007, p. 8)

Destination, performance, régulation et qualité sont autant de notions à évoquer pour traiter du pilotage d’un établissement d’enseignement. Ces notions se rapportent à ce qui est convenu d’appeler l’efficacité de l’enseignement (Demeuse, Baye, 2001). Plus spécifiquement, lorsqu’il est question de pilotage et d’efficacité, c’est la recherche d’un effet établissement qui est en cause (Dumay, Durpiez, 2009), un effet sur l’environnement éducatif et d’enseignement des élèves. Cet effet est reconnu indirect sur leurs apprentissages, car il se porte sur les pratiques d’éducation et enseignement des membres de son personnel qui, de façon directe, impactent les apprentissages des élèves (Pont, Deborak, Hunter, 2008).
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Nous abordons la notion d’efficacité de l’établissement en reprenant les travaux de (Payette, 1993) et de (Boyer, 2000) sur l’efficacité des organisations et de leurs gestionnaires. Nous la représentons à travers un schéma où l’efficacité correspond, à la suite des actions accomplies, à l’atteinte, dans les résultats obtenus, de résultats projetés; ces résultats projetés correspondant aux intentions à l’origine des actions et étant établis en fonction de la situation sur laquelle les actrices et les acteurs veulent agir.

L’efficacité de l’action

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En ce qui concerne la recherche de l’efficacité de l’action, les interventions de pilotage font appel à quatre phases propres à la régulation (Demeuse et Baye, 2001) :

  • Une prise d’information sur les résultats et le fonctionnement du système;
  • Un diagnostic, par l’évaluation, repérant les écarts et les rapprochements entre les intentions (résultats projetés, les finalités) et la réalité des opérations et des résultats obtenus;
  • Une détermination des actions à maintenir, à amplifier et à implanter (l’exercice de faire des choix, une prise de décision par une intelligence organisationnelle);
  • La mise en œuvre contrôlée des améliorations (mesures correctives, élargissement et implantation d’actions porteuses).

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Piloter consiste à recueillir un ensemble d’informations pertinentes, les confronter à un ensemble de critères et prendre les décisions qui s’imposent et qui conditionnent la gestion des opérations dans le présent, selon l’histoire passée et en fonction du futur souhaité.(De Ketele et Gérard, 2007)

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L’intervention de pilotage dans l’établissement

Retenons que le pilotage se rapporte aux interventions des directions dans la dynamique organisationnelle de l’établissement cherchant à optimiser son efficacité, soit une correspondance entre :

  • Les analyses de situation,
  • Les intentions concernant les résultats recherchés,
  • Les actions menées,
  • Les résultats obtenus.

 

1.2  Piloter selon un modèle systémique

Lorsque nous abordons l’école sous l’angle de sa dynamique d’organisation, nous lui reconnaissons deux dimensions majeures : les décisions et les actions (Maggi, 2003) qui se conjuguent ensemble pour produire, autant que possible, des résultats proches des intentions initiales. Si les actions sont le cœur des opérations de l’établissement, les prises de décision sont au cœur de son pilotage : veiller à ce que les actrices et les acteurs fassent les bons choix :

Le modèle de pilotage d’un établissement proposé, vu comme un système, comporte six sous-systèmes où la prise de décision est au premier plan. Concomitants à ce sous-système central, nous rencontrons ceux de finalisation, de communication organisationnelle, d’évaluation organisationnelle, d’intelligence organisationnelle et de veille. Chacun de ces six sous-systèmes intervient dans les processus de Planification, Organisation, Direction, Contrôle (PODC) soit dans  la gestion de l’enseignement, des personnes et des groupes (ressources humaines), du soutien au parcours scolaire et des ressources matérielles et financières afin que leurs opérations se lient les unes aux autres pour optimiser les résultats. Ainsi, nous illustrons que chacun des six sous-systèmes de pilotage agit sur la gestion des opérations pour les articuler les unes avec les autres au regard des résultats recherchés.

 

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Les processus de pilotage de l’établissement

Brièvement, nous présentons ces sous-systèmes au regard des processus que les actrices et acteurs activent dans chacun d’eux.

Les sous-systèmes de pilotage de l’établissement

Le recours au macroscope pour l’action

Pour illustrer cette approche systémique des interactions entre les composantes d’une organisation humaine complexe, tel un établissement d’enseignement, nous empruntons la métaphore du « macroscope » proposé par (Joël De Rosnay, 1975). Il la présente en tant qu’instrument qui, contrairement au microscope qui observe la réalité en la décomposant, permet d’appréhender cette réalité dans sa globalité et sa complexité[1] pour y agir de façon pertinente en activant les interactions entre ses composantes. 


[1] Du latin complexus «fait d’éléments imbriqués»; cum, co et plectare «plier, entrelacer», selon le dictionnaire historique de la langue française (Rey, 1992).

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Servons-nous donc du macroscope pour porter un regard neuf sur la nature, la société et l’homme. Et pour tenter de dégager de nouvelles règles d’éducation et d’action. Dans son champ de vision, les organisations, les évènements, les évolutions s’éclairent d’une lumière toute différente. Le macroscope filtre les détails, amplifie ce qui relie, fait ressortir ce qui rapproche. Il ne sert pas à voir plus gros ou plus loin. Mais à observer ce qui est à la fois[1] trop grand, trop lent et trop complexe pour nos yeux (comme la société humaine, cet organisme gigantesque qui nous est totalement invisible). Jadis, pour tenter de percer les mystères de la complexité, on recherchait les unités les plus simples qui permettaient de l’expliquer : la molécule, l’atome, les particules élémentaires. Mais aujourd’hui, par rapport à la société, c’est nous qui sommes ces particules. Cette fois, notre regard doit se porter sur les systèmes qui nous englobent, pour mieux les comprendre avant qu’ils nous détruisent. Les rôles sont inversés : ce n’est plus le biologiste qui observe au microscope une cellule vivante; c’est la cellule elle-même qui regarde au macroscope l’organisme qui l’abrite…

C’est cette nouvelle approche (systémique) que symbolise le macroscope. Elle s’appuie sur une approche globale des problèmes ou des systèmes que l’on étudie et se concentre sur le jeu des interactions entre leurs éléments. (De Rosnay, 1975, p. 10 et 11)


[1] Souligné par l’auteur.

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Une approche systémique des résultats

Nous avons vu que le pilotage se rapporte à des interventions visant à optimiser les résultats de l’établissement. La préoccupation ultime d’un pilote n’est-elle pas que les passagers et l’équipage se rendent à bon port? Les résultats d’apprentissage et d’éducation des élèves sont certes la cible ultime de l’établissement. Toutefois, cette seule cible demeure insuffisante pour un déploiement optimal des opérations menées par tous ses actrices et acteurs (individus, groupes, instances). Le pilotage de l’établissement commande d’aborder la question de ses résultats de façon à traduire la réalité complexe dans laquelle ceux-ci se produisent et ainsi fournir des repères permettant d’y intervenir avec efficacité. Dans notre approche systémique, nous concevons non pas un résultat unique, mais plutôt une configuration de résultats qui, en interaction dynamique, concourent ensemble à atteindre les niveaux d’apprentissage recherchés chez les élèves.

Pour tenir compte de la réalité complexe produisant les résultats scolaires, et afin d’agir sur elle avec le plus de pertinence possible, il est utile, pour ne pas dire essentiel, de saisir l’enchaînement des différentes visées et des résultats à atteindre :

  • Les résultats d’apprentissage des élèves ne seront atteints que si ceux-ci arborent les attitudes et les comportements menant à ces résultats.
  • Ces attitudes, comportements et ces résultats d’élèves ne pourront être atteints que si les enseignantes et enseignants et autres actrices et acteurs mènent des processus d’actions appropriés et ciblés.
  • Ces processus d’actions seront menés de façon appropriée que si les enseignantes, enseignants et autres acteurs apprennent comment le faire et développent des outils organisationnels pour ce faire.
La déclinaison des résultats à atteindre dans un tel enchaînement – interactions- où les liens entre eux sont démontrés est de nature à interpeller l’ensemble des actrices et acteurs de l’établissement. Un pilotage efficace mettra à jour chacun des maillons de la chaîne de résultats, fera apparaître les liens entre eux et traitera chacun d’eux comme une partie d’un tout à orchestrer. Rappelons que la force d’une chaîne est égale à la force de son maillon le plus faible. On aura beau insister sur l’atteinte des résultats d’apprentissage des élèves, si ces derniers ne répondent pas aux visées recherchées en termes d’attitudes et de comportements (motivation, pratiques de lecture…), si des processus d’actions ne sont pas au rendez-vous pour créer les conditions nécessaires (pratique d’enseignement, interventions auprès d’élèves…) et si les membres du personnel ne visent pas à rencontrer des cibles d’apprentissage et de développement organisationnels déterminantes pour ces processus d’actions (maîtrise d’une approche particulière, dispositif de soutien professionnel…), les résultats produits, rappelons-le, par les élèves ne seront pas au rendez-vous.
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Les processus de pilotage de l’établissement en fonction des résultats ciblés

À une époque où les systèmes d’éducation nationaux optent pour une gestion par résultats, souvent couplée avec des contractualisations en fonction de résultats produits par les élèves, soit leurs apprentissages, un tel modèle systémique et « macroscopique » des résultats nous apparaît des plus pertinents au pilotage des établissements à exercer. Dans ce modèle, les apprentissages réalisés et témoignés par les élèves sont le dernier maillon d’un enchaînement complexe de résultats produits par l’ensemble des actrices et des acteurs du système éducatif. Le pilotage concerne des interventions relatives à chacun de ces maillons de résultats sachant que chacun d’eux mène, de façon ultime, aux résultats d’apprentissage et d’éducation des élèves.

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Piloter avec pertinence

Cette proposition d’un modèle de pilotage est, comme toute représentation de système, une construction de l’esprit qui vise à fournir des repères conceptuels pour aider à piloter l’établissement. À ce titre, pour soutenir leurs actions, il nous apparaît pertinent que les pilotes se donnent une représentation de la réalité complexe dans laquelle ils oeuvrent et des interactions qui la constituent afin d’y intervenir avec le plus de pertinence possible.

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Une direction en double piste de l’établissement

Évoquer, comme nous l’avons fait précédemment, à la fois la gestion des opérations et le pilotage comme fondements d’une pratique de direction, c’est reconnaître que cette pratique a une double nature et se réalise en double piste.

Continuons dans les métaphores de l’optique pour illustrer cette double nature ou double piste et recourons aux images d’instruments de vision monoculaire et binoculaire. Une direction uniquement préoccupée de la gestion des opérations est fondée sur une vision que nous pourrions qualifier de monoculaire. Les objets du champ de vision sont perçus sans perspective entre eux. Dans une telle vision simplificatrice, tous les objets à gérer apparaissent être sur un même plan, celui  des opérations à mener les unes à la suite des autres dans un fonctionnement d’actions-réactions et de commandes-exécutions. Une direction préoccupée à la fois des opérations et du pilotage est fondée sur une vision que nous pourrions qualifier de binoculaire, en double piste d’intervention : celle de la gestion des opérations et celle du pilotage. Dans une telle vision, les objets sont perçus selon leur situation les uns par rapport aux autres et, d’un seul coup d’œil, ils sont mis en perspective d'une destination. Dans cette vision complexe où la gestion des opérations et leur pilotage se croisent, les objets apparaissent liés les uns aux autres sur plusieurs plans selon des intentions plus ou moins convergentes (résultats projetés) et au service de résultats obtenus avec plus ou moins d’efficacité.

 

  1.3  Piloter la pédagogie, c’est piloter l’ensemble des opérations

Une direction d’établissement doit veiller à son fonctionnement. À ce titre, cette fonction se rapporte à la gestion des multiples opérations de ce fonctionnement concernant autant les domaines de l’enseignement, de la gestion des personnes et des groupes, du soutien au parcours scolaire et des ressources matérielles et financières. Cette gestion des opérations est réalisée à travers quatre grands processus que sont la Planification, l’Organisation, la Direction et le Contrôle communément appelés PODC.  Tout membre de direction d’établissement reconnait comment, au quotidien, il est accaparé tant par ces multiples opérations que par les processus PODC par lesquels il les gère.  Comme l’indique Brassard (1996), la fonction de gestion, au-delà des exigences qu’elle comporte, ne se limite pas seulement aux opérations de maintenance de l’établissement.  Elle se rapporte à des normes de « bon fonctionnement », un fonctionnement par lequel l’établissement est « conforme à sa constitution, et ce, en conséquence, aux attentes de ceux qui exercent le gouvernement » (p.18). Ce caractère normatif attribué au « bon » fonctionnement concerne, au- delà de ses opérations à mener, la qualité de leur exécution au regard des résultats en termes d’apprentissage et d’éducation des élèves; il concerne le trajet à parcourir et la destination à atteindre pour revenir à la métaphore du pilotage

Le pilotage, tel qu’illustré dans la figure ci-dessous, porte non seulement sur la gestion des opérations de l’établissement, mais aussi sur les processus par lesquels elles sont gérées soit la planification, l’organisation, direction et contrôle. Il interpelle une approche systémique et globale de cette gestion des opérations. Ainsi vues, les interventions de pilotage suscitent l’émergence et l’entretien de liens, non seulement entre les opérations des différents domaines, mais aussi entre chaque processus de gestion, et ce, en fonction d'intentions convergentes et de résultats d’apprentissage et d’éducation recherchés pour optimiser l’effet établissement et l’efficacité des actions accomplies auprès des élèves.

Pilotage pédagogique des opérations de l’établissement

Compléments

 

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Exemples de préoccupations de pilotage dans la gestion des opérations

P - La Planification de l’enseignement est-elle liée à la Planification des ressources matérielles et financières?

O - L’Organisation du travail des personnes et des groupes correspond-elle à l’Organisation du soutien à l’apprentissage recherché?

D - La Direction des ressources humaines, matérielles et financières est-elle liée à la Direction de l’enseignement?

C - Le Contrôle des opérations de l’école est-il au service de la Planification du soutien à l’apprentissage scolaire?

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Le pilote ou l'équipe de pilotage gère toutes les opérations de l’établissement afin d’optimiser leurs interactions et les interdépendances en vue des finalités éducatives communes (De Ketele et Gérard, 2007). Dans cette vision, les pratiques de pilotage et celles de gestion des opérations se conjuguent ensemble de façon à la fois distincte et complémentaire. Pour illustrer cette idée, nous empruntons l’image tourbillonnaire du changement du Yin et du Yang, une image « d’un mouvement cyclique ininterrompu » (Morgan, 1989) qui illustre que : 

  • la gestion des opérations et le pilotage sont à la fois séparés et unis;
  • s’ils sont opposés, chacun porte le germe de l’autre;
  • dans leur interdépendance, chacun ne peut exister sans l’autre;
  • une organisation optimale rétablit constamment, dans le flux continu des changements, l’équilibre entre les deux pôles (action et prévision, immédiat et lointain, réaction et proaction, implicite et explicite, intentionnel et spontané…).

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1.4  Piloter au-delà des occupations de gestion

La gestion d’un établissement scolaire commande une multitude, en nombre et en variété, d’opérations à mener. Cette multitude d’opérations génère chez les gestionnaires, comme l’indique Mintzberg (1984) et Mintzberg (2010), non seulement un rythme soutenu de travail, mais aussi une fragmentation et une discontinuité dans leurs activités : « le gestionnaire est sans cesse poursuivi par ce qu’il pourrait et devrait faire » (p. 41). Dans ce contexte de travail, il n’est pas étonnant que cet auteur en arrive à observer une propension à l’action chez eux : « les gestionnaires aiment l’action, les activités qui changent et qui s’enchaînent; ils adorent les tâches qui sont concrètes sans être routinières » (p. 42). Il parle d’un « syndrome de la superficialité » qui guette les gestionnaires. Pour contrecarrer ce syndrome, les gestionnaires reconnus compétents développent une capacité de réflexion dans l’action, de « réfl’action ». Au-delà des occupations de gestions accaparantes, nous postulons, à la suite de travaux de Leclerc (2007), que les gestionnaires compétents ont constamment en tête des préoccupations à partir desquelles ils modulent leurs actions. Au-delà d’attitudes d’actions/réactions ou même de commandes/exécutions, ces gestionnaires demeurent en « état d’éveil mental » face aux évènements rencontrés et à leurs effets. À travers la multitude de stimuli, ils arrivent à maintenir une direction, à orchestrer leurs interventions en fonction d’une destination plus ou moins formalisée se précisant à la lumière des évènements : une « destination chemin faisant » pour reprendre l’expression d’Avenier (1997).

 

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Cet état d’éveil au regard d’un objet de pratique est associé à l’intérêt porté envers cet objet et, comme l’indique Leclerc (2007), aux savoirs d’expertise reliés à cet objet. Ainsi, les « agirs » des débutantes ou débutants ne seront pas de même nature que ceux de professionnels confirmés. Les débutantes et débutants s’efforceront davantage à mener avec efficience des occupations de gestion des opérations qu'ils ont avant tout à s’approprier tandis que les professionnels confirmés s’efforceront de répondre à des préoccupations relatives à leur contexte d’action à travers l’ensemble de leurs occupations de gestion. Notre approche systémique du pilotage d’un établissement s’inscrit dans cette perspective du développement d’expertise. Nous proposerons moins des outils opérationnels de gestion que des savoirs sur la dynamique organisationnelle de l’établissement pouvant constituer un répertoire de préoccupations pour des gestionnaires professionnels confirmés.

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1.5  Piloter, c'est relier

L’organisation est l’agencement des relations entre composantes ou individus qui produisent une unité complexe organisée, ou système, dotée d’une relative autonomie.

Edgar Morin

Nous postulons que l’établissement s’organise en liant entre elles ses composantes animées et inanimées. Dans cette dynamique de «reliance» (Morin, 2004)  l’établissement est vu comme un tout auto-organisé liant ses composantes afin de produire des activités éducatives propres à sa mission. Piloter un établissement d’enseignement c’est y exercer un leadership qui relie ces composantes animées et inanimées afin qu’émerge une organisation  éducative  visant à optimiser  les apprentissages des élèves. Le système de pilotage est conçu à partir de cette posture. 

 

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L’établissement s’auto-organise en liant d’une façon qui lui est propre l’ensemble de ses composantes : ses élèves, ses enseignantes et enseignants et ses autres membres du personnel, un programme, un projet, des activités, des règles, des ressources… les parents, les organismes partenaires… Les pilotes interviennent pour optimiser l’aménagement de ce tissage relationnel - son organisation - pour faire apprendre.

L’établissement vu comme un organisme vivant  

Nous voyons l’établissement comme un organisme vivant qui produit un service de scolarisation en aménageant et réaménageant de façon continue les liens entre ses composantes en fonction de son ultime finalité : faire apprendre les élèves. Il produit ce service en reliant ses actrices et acteurs - élèves, enseignants et enseignantes, intervenantes et intervenants, directions…- ainsi que ses composantes non animées – programme, règles, politiques, idées, ressources, résultats, contexte politique… - selon un aménagement organisationnel, une organisation qui lui est propre. À travers cette dynamique interactive de liaison, qu’Edgar Morin nomme « reliance » (2004), l’établissement s’auto-organise en fonction de l’environnement particulier dans lequel il œuvre. Cet environnement est source d’informations que ses actrices et acteurs interprètent pour décider et agir, en d’autres mots pour s’organiser (Maggi, 2003), dit autrement pour s’auto-organiser

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« L’organisation est dans le processus, c’est ce qui est en train de se construire et de se déconstruire via l’interaction entre les personnes. » (Vidiallet, 2003, p 6)

Les membres de la direction participent à cette dynamique interactive d’aménagement et de réaménagement de liens d’organisation. Ils ne la contrôlent pas de façon mécanique à coup de suggestions, de préconisations ou de directives. En d’autres mots, ils n’organisent pas l’établissement, ils participent en fonction de leurs pouvoirs et de leurs responsabilités, avec ses autres actrices et acteurs, à son organisation. À partir de reliances créées, suscitées, entretenues ou même stimulées, ils interviennent dans son auto-organisation.  Leur mandat est de mener des actions qui, couplées de façons interactives (Varela, 1989) avec les actions des autres actrices et acteurs de l’école, « feront émerger des configurations d’organisation et des dynamiques constitutives opportunes à la poursuite de sa mission » (Boyer, 2000, p. 82). Pour faire image, nous pouvons dire, comme Probst (1987) l’évoque, qu’ils «organisent l’auto-organisation» de l’établissement.

L’encadrant aurait donc intérêt à se prendre pour une «planche de surf», sur des vagues qu'il ne provoque qu'en partie, plutôt que de se positionner en «locomotive». Il  devrait apprendre à vivre avec cette idée que ce n'est pas lui qui décide, mais les événements, les dynamiques, la manière souvent inattendue dont la «mayonnaise» prend ou ne prend pas. Il devrait apprendre à appeler «décision» la consécration officielle d'un état de fait,  à la manière de ce gouvernement affirmant : «puisque ces évènements nous échappent, feignons de les organiser». Il devrait enfin apprendre à conjuguer les réflexions et les actions à court, moyen et long terme, et  savoir que dans une longue bataille, seule la «fin couronne l'oeuvre » (Clausewitz). (Mispelblom Beyer, 2015, p.281).

1.6  Rechercher des effets levier

Donnez-moi un point d’appui et je soulèverai le monde.

Archimède

Dans notre perspective, la recherche d’une amélioration des apprentissage des élèves passe par des interventions à effet levier. Ces interventions, à la suite d’une analyse de système, ciblent les liens névralgiques, soit ceux qui sont les plus propices à créer ou à amplifier pour générer la dynamique d’amélioration recherchée. Étant donné l’interdépendance entre l’ensemble des composantes animées et inanimées de l’établissement, une intervention produisant un impact amplificateur sur une de ses composantes névralgiques aura un effet démultiplicateur sur ses autres composantes : un effet levier.

 

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L’utilisation d’un levier vise à réaliser la plus grande économie de moyens : les meilleurs résultats viennent plus souvent de petites actions bien ciblées que d’efforts de grande envergure. Malheureusement notre difficulté à tenir un raisonnement systémique nous incite trop souvent à mettre en œuvre des actions à faible effet de levier : nous nous concentrons sur de simples symptômes alors que le problème touche le cœur du système (Senge, 1991, p 154).

Exercer un leadership de reliance

Au-delà d’une stricte implantation de pratiques éprouvées ailleurs ou même de pratiques dites « probantes » à importer, ce sont les interventions à effet levier sur la dynamique de reliance dans l’établissement qui sont les plus déterminantes. Pour les membres de la direction, les pilotes de l’établissement, cette recherche d’effet levier passe par des initiatives et un leadership de reliance - relier, être relié et se relier (Bolle de Bal, 2003)- fondé sur un « savoir relier » (Gauthier, 2014)

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Le mot savoir désigne la connaissance, mais aussi, par extension, le savoir-faire, le savoir-être. Relier renvoie à la capacité de connecter, de créer ou de découvrir des rapports, de tisser des liens et, par extension, de compter sur les autres et soi-même…

Loin de nier les tensions ou la complexité, le savoir-relier en fait son miel. Il suppose de faire appel à un certain nombre de dimensions critiques du leadership comme la confiance, la résilience, l’agilité et le courage pour améliorer notre aptitude à naviguer dans le monde de plus en plus complexe et hautement relationnel dans lequel nous vivons. Également caractérisé par l’humilité et l’intuition, il reconnaît l’importance des relations humaines et la valeur de la diversité, considérées comme les ressorts de l’innovation et de la performance.  C’est un outil qui permet d’aborder et de gérer des problèmes complexes aux niveaux individuel, interpersonnel, organisationnel et institutionnel et sociétal.

Mais le savoir relier est avant tout un acte : l’acte d’établir des relations sensibles et durables entre de entités différentes ou divergentes afin de construire du sens, pour les individus comme pour les organisations. Développé au niveau individuel, le savoir-relier est une aptitude : les dirigeants utilisent leurs talents analytiques et émotionnels pour tisser des relations plus fortes et meilleures entre les membres de leur organisation. En s’appuyant sur leur intelligence sensible, ils créent aussi du sens et encouragent l’initiative et l’autonomie nécessaire au développement. Adopté à l’échelle de l’entreprise entière, le savoir-relier devient un état d’esprit qui génère une identité collective. (Gauthier, 2014, p.14.15)

Par ce leadership de reliance, les membres de la direction de l’établissement suscitent, encadrent et accompagnent des processus individuels et collectifs de construction de sens, d’attribution de significations partagées au regard des situations présentes, des finalités à établir, et des opérations à entreprendre et de résultats à observer. (Gauthier, 2014)

Nous abordons le pilotage de l’établissement en tant qu’exercice d’un leadership de reliance auprès des actrices et acteurs de l’établissement qui suscite de leur part des choix, le suivi et la régulation de leurs actions en fonction de finalités partagées : un pilotage qui organise une auto-organisation.

En reprenant les propos de Scheerens, nous reconnaissons un caractère « léger » à ce type de leadership qui tempère, selon lui, la tentation du contrôle et de « trop de management » (2012). À ce titre, il met en garde contre une littérature sur le leadership scolaire qui, dans une logique où l’établissement est vu comme une bureaucratie professionnelle, peut être prompte à promouvoir des pratiques de gestion jugées universellement efficaces.  Dans cette promotion de pratiques reconnues probantes, l’accent est porté sur les savoirs d’action à activer par les directions – les best practices- indépendamment des dynamiques d’organisation dans lesquels ils oeuvrent; indépendamment des auto-organisations dans lesquelles ils interviennent pour y activer les reliances. À la tentation de contrôle par l’application de gestes professionnels formatés, il oppose des gestes de «méta-contrôle» où l’accent est mis sur des interventions appropriées aux auto-organisations à dynamiser.

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On assiste ainsi à une tendance pour faire du management une activité spécialisée qui serait essentiellement fondée sur la « maîtrise d’outils ». Fortement jargonnante, cette tendance la coupe de ses racines communes avec d’autres activités (former, éduquer, commander) et de son propre sens, car la préoccupation majeure devient la « bonne mise en œuvre » d’un outil. Croyant peut-être que les « bons outils font les bons ouvriers », et ce dans une comparaison bancale entre les outils industriels et les écrits du management, on fait comme s’ils pouvaient être coupés de la pensée qui les guide, des savoir-faire qui les mettent en œuvre et des rapports sociaux où ils s’inscrivent. Version moderne de la one best way de Taylor ? La prescription managériale des pratiques d’encadrement entame ainsi jusqu’à la capacité des managers de penser par eux-mêmes, à moins de s’en distancer. (Mispelblom Beyer, 2015 , p21)

Ce rôle pourrait être bien saisi avec le concept de «méta-contrôle», qui littéralement signifie le contrôle du contrôle. Le leadership scolaire en tant que méta-contrôle chercherait à exploiter pleinement le potentiel du leadership partagé, du leadership organisationnel et des substituts du leadership tout en conservant une vision globale du bon fonctionnement de l'ensemble. (traduction, Scheerens, 2012, p134)

Le travail théorique et les résultats des études empiriques soulignés dans ce rapport suggèrent que dans les situations « normales » des écoles moyennes, une gestion « allégée » pourrait suffire, ce qui permettrait une utilisation maximale des substituts disponibles et de l'auto-organisation  par le personnel de l'école et d'autres dispositions. Nous avons comparé ce type de gestion au « méta-contrôle », ce qui pourrait être interprété comme l'orchestration du contrôle par les autres acteurs de la scène scolaire (traduction, Scheerens, 2012, p146).

Le modèle systémique de pilotage que nous proposons se veut être un outil de référence offrant des repères pour guider l’exercice de l’influence auprès des actrices et des acteurs de l’établissement. Il propose le langage de son auto-organisation permettant d’y déceler des leviers organisationnels à activer pour y susciter et entretenir les reliances propices aux apprentissages des élèves. Chacun de ses sous-systèmes comporte de tels leviers.

 

Les leviers d’auto-organisation de l’établissement

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Toutes les interventions des pilotes visent, d’une façon ou d’une autre, à ce que les activités de l’établissement s’opérationnalisent afin d’optimiser les apprentissages et de l’éducation de ses élèves. Si l’usage d’outils est essentiel à cette opérationnalisation, il n’en est pas l’essence. Quels que soient les outils proposés, aussi universels que souvent prétendus par leurs promoteurs, ils ne peuvent prédéterminer leur usage effectif, car cet usage émerge des reliances générées entre les composantes animées et inanimées de l’établissement se configurant selon les circonstances, les contingences, les intérêts, les finalités, les pouvoirs, les alliances, les possibles ...  Notre proposition «d'un langage» pour lire et interpréter, dans une approche systémique, la dynamique d’auto-organisation de l’établissement et y déceler des leviers est assortie d’un certain nombre d’outils, souvent à titre illustratif, permettant de concevoir et d’articuler des interventions de pilotage. De plus, au gré des contributions de collègues au site, s’ajouteront d’autres conceptions et outils souvent éprouvés dans des pratiques. Souhaitons que ces outils de lecture organisationnelle de l’établissement et d'intervention fondés sur des préoccupations de pilotage soient non pas des prêts à penser  et  à agir,  mais soient  suffisamment inspirants pour permettre aux pilotes des interprétations créatives de leur agir.

 

Contribution des participantes et participants

Vous êtes invités à commenter et enrichir les documents par vos commentaires, des observations sur votre pratique et votre contexte de pilotage.