Des finalités à conscientiser pour s’organiser

2.3  Piloter de la mission aux objectifs

Les finalités se déclinent sous différentes composantes selon l’ampleur qu’elles couvrent dans le temps et dans l’organisation. Ces composantes sont : la mission, la vision, les orientations stratégiques et les objectifs.

 

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La mission : l’appel [1]

La mission est l’affirmation de la vocation primordiale reconnue à l’organisation, de sa raison d’être: Pourquoi sommes-nous en action? (Johnson, Scholes, Fréry, 2000). Dans une organisation publique comme l’école, la mission est une obligation de servir la société, les citoyennes et les citoyens (Mazouz, Leclerc, 2008). En matière de pilotage, la mission est une intention globale qui énonce le sens de l’action dans deux dimensions :

  • la signification de l’action, cette signification suscitant l’engagement des actrices et des acteurs;
  • les sens des actions indiquant une direction vers laquelle les actrices et les acteurs s’orienteront.
Cet appel à une action orientée est source d’identité personnelle et d’appartenance collective.
Pourquoi sommes-nous en action?

[1]-La notion de mission telle qu’employée ici se rapporte à l’organisation dans son ensemble, à sa vocation en tant qu’institution en réponse à un besoin et à des attentes sociales. Cette notion prend une signification opérationnelle lorsque, dans une « lettre de mission » adressée à un individu et même à un groupe donné, des objectifs et des spécificités d’opération sont indiqués.

Comme la raison d’être justifie la légitimité de l’organisation, celle-ci doit être arrimée au plus juste avec les besoins et attentes à satisfaire auprès de la population par l’intermédiaire des stratégies et des structures d’offre de cette première. (Mazouz, Leclerc, 2008, p. 262)

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La vision : le rêve

La vision est la traduction des finalités en une image qui permet de projeter l’organisation dans le futur. La phrase célèbre de Martin Luther King : « I have a dream » contenue dans son discours du 28 août 1963 sur le Mouvement pour les droits civiques est une illustration d’une vision qui a inspiré toute une population à agir : le rêve d’une vie quotidienne sans discrimination dans les autobus, à l’école, au travail…

« En parlant comme il l’a fait, il a éduqué, il a inspiré, il a guidé non pas simplement les gens qui étaient là, mais les gens partout en Amérique ainsi que les générations à venir. » (Paroles de John Lewis, député américain, rapportées dans Wikipédia, consulté le 9 octobre 2011- http://fr.wikipedia.org/wiki/I_Have_a_Dream)

Pour une école, il s’agit d’énoncer comment elle pourrait se vivre dans le futur, ce qu’elle deviendrait et ferait si ses aspirations se réalisaient.

 

Que voulons-nous devenir?

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Les objectifs stratégiques : les orientations [1]

La mission et la vision se rapportent aux aspirations à propos du devenir de l’école. Pour se matérialiser, ces aspirations devraient se traduire dans des actions sur sa réalité. Mais celle-ci est complexe, incertaine, et le fruit de la rencontre d’une multitude de circonstances difficiles à discerner. Afin de choisir avec pertinence les actions, une analyse de situation est nécessaire pour s’en donner une image la plus juste possible. De cette analyse sont repérés des facteurs limitatifs. Ces facteurs sont reconnus limitatifs, car leur carence limite l’apport d’un ensemble d’autres facteurs au développement de l’établissement, exemples : un climat de travail freinant la collaboration à l’amélioration des pratiques, des difficultés en lecture qui impactent les apprentissages dans l’ensemble des matières, des pratiques d’évaluation des apprentissages qui n’alimentent pas la réflexion sur les enseignements…   

Lorsque l’établissement peut avoir un impact sur ceux-ci, ils y deviennent des facteurs stratégiques, car leur transformation peut avoir un effet levier sur un ensemble d’autres facteurs déterminants. Des facteurs qui, contrôlés « de la bonne façon, à la bonne place, et au bon moment » (Payette, 1993, p. 283), permettraient l’émergence d’une nouvelle configuration de circonstances propices à un développement se rapprochant des aspirations sur le devenir de l’établissement. Sur le plan du processus de finalisation, ces facteurs peuvent être traduits en orientations stratégiques qui deviennent des repères vers lesquels les actions seront orientées : assainir le climat de travail; augmenter les compétences des élèves en lecture; revisiter les normes et modalités d’évaluation afin que les informations évaluatives produites servent la réflexivité sur les pratiques.

Où voulons-nous aller?

[1] Il est à noter que plusieurs écoles ajoutent à la mission, à la vision et à l’orientation, des énoncés de valeurs. À titre de composantes complémentaires, les valeurs peuvent permettre d’apporter des précisions aux énoncés de finalités d’une organisation et de mieux éclairer les choix d’actions à la lumière de ces jugements de normes. Dans notre propos sur les finalités de l’école, nous ne les avons pas retenues afin d’éviter les ambigüités au regard de leur apport dans le système de finalisation. En effet, une place prépondérante, souvent exclusive, a souvent été accordée aux valeurs dans le projet éducatif d’écoles québécoises. À notre avis, on créait ainsi une confusion entre des énoncés de valeurs, servant à juger des normes sociales recherchées dans l’école et des énoncés fondamentaux de mission, de vision et d’orientation précisant les finalités d’actions et encadrant leur organisation.

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De la stratégie à la tactique et aux opérations

Les objectifs opérationnels

Les finalités se déclinant en mission, visions et objectifs stratégiques se rapportent aux intentions stratégiques de l’action relatives « à l’état futur souhaité, aux aspirations de l’organisation » (Johnson, Scholes, Fréry, 2000), et ce, en fonction d’une compréhension de la situation : la bonne orientation fondée sur la bonne compréhension de la situation. Ces intentions stratégiques sont de longue portée dans le temps et précisent les directions que prendront les combinaisons d’actions. Par contre, avant de passer à ces actions, il faut bien choisir chacune d’elles qui, dans un temps court, devrait produire un résultat circonscrit : la bonne action et le bon résultat. Ce choix d’action marque le passage des intentions stratégiques aux intentions tactiques ou opérationnelles relatives à des choix à portée restreinte dans le temps et se rapportant aux modalités d'action à mettre en place pour atteindre un résultat rapproché. Ces intentions sont formulées en termes d’objectifs opérationnels de résultat à atteindre ou de processus à activer.[1]


Que voulons-nous faire et quels résultats voulons-nous obtenir?

[1] Nous présentons les objectifs comme une indication d’actions. En cela, nous nous distinguons des invitations à décrire, dans l’énoncé de l’objectif et de façon spécifique et mesurable, ce qui est à changer ou ce qui est à obtenir. Selon notre point de vue, l’exercice de formulation des objectifs, qu’il comporte ou non de telles spécifications, doit davantage être un effort de mobilisation et d’expression collectives permettant une coconstruction de significations collectives aux opérations à mener qu’un devoir de formulation selon des normes opérationnelles précises. Nous considérons qu’à partir d’un énoncé signifiant pour eux, les actrices et les acteurs (individus ou groupes) seront en mesure, par la suite, d’y apporter les précisions utiles dans une formulation subséquente d’indicateurs et de cibles. Il est important de rappeler que la stratégie s’élabore chemin faisant. Les objectifs sont avant tout des unités de signification en coconstruction constante autour desquelles une organisation, avec ses exigences de rigueur, prendra forme. Nous reviendrons sur cet ensemble d’objectifs, d’indicateurs et de cibles dans le module sur la veille.

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Les choix tactiques ou opérationnels, de la « bonne chose à faire », sont les dernières composantes du système de finalisation à piloter : la dernière transformation des finalités après qu’elles soient déclinées en mission, vision et objectifs stratégiques. Par la suite s’ouvrent l’opérationnalisation des actions et leur gestion à travers les plans, la réalisation et le contrôle. S’ajouteront, comme opérations de pilotage, les interventions suscitant l’évaluation.

Lorsqu’une direction intervient, à partir des énoncés de mission de l’établissement, dans le processus de transformation des finalités de l’école en vision, orientations stratégiques et objectifs, les interventions de pilotage veillent à ce que ces composantes se fondent sur une bonne compréhension de la réalité de l’école et assurent la pertinence des orientations établies : les bonnes orientations. Dans cet exercice de vigilance, une direction se réfère continuellement aux résultats obtenus afin de les questionner au regard des énoncés d’objectifs et d’orientation. Ainsi, à partir d’un questionnement continu sur les résultats et, de façon ultime, sur les apprentissages des élèves, cette direction aide l’école à apprendre à s’organiser en tant que tout et aide ses parties (la classe, le cycle, le département, le comité…) à apprendre à contribuer avec efficacité au devenir recherché de l’école.

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Un leadership pour la vision

Les directrices et les directeurs d’établissement, par le leadership qu’ils exercent, jouent un rôle de premier plan dans l’articulation de ses finalités et de chacune de ses parties : la classe, les cycles, les comités… Ils sont non seulement des individus contribuant aux actions, des coopérateurs au service de la réalisation d’objectifs communs et des chefs compétents qui favorisent une organisation des ressources pour atteindre des objectifs prédéterminés, mais ils peuvent surtout être des pilotes qui catalysent les engagements dans la poursuite d’une vision collective suscitant, selon Collins (2003) une recherche conjointe et durable d’excellence.

Consulter :

Une présentation sommaire des scénarios à l’adresse suivante :

http://www.oecd.org/edu/school/quelavenirpournosecoles.htm

Une présentation élaborée des scénarios à l’adresse suivante[1] :

http://www.oecd.org/fr/edu/scolaire/1840081.pdf

Selon vous, le futur de votre école pourrait s’inscrire dans laquelle de ces visions?

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